Chers fidèles, chers amis,
Le dernier numéro des feuilles du Sacré-Cœur date de mai 2022. Cela fait maintenant plus d’un an. Il était consacré à l’histoire du Cœur Immaculé de Marie et demandait une suite. En le relisant, je constate qu’à l’époque on parlait déjà de la guerre en Ukraine, que les sociétés civiles n’avaient plus grand-chose de catholique, que l’Église elle-même subissait une terrible persécution par la fureur de ses ennemis mais aussi par la faiblesse et la lâcheté de beaucoup de ses enfants et que la solution était de recourir à la dévotion au Cœur Immaculé de Marie. Aux nouvelles de la chapelle j’annonçais le décès de notre regretté Mgr Dolan. Un an est passé, la guerre en Ukraine est toujours là et continue à faire rage. On ne voit toujours pas la fin de la crise de l’Église. Une Église sans Pape depuis tant d’années !
Et le clergé resté fidèle qui n’arrive pas à se réunir (volontairement ou involontairement… Dieu seul le sait !) pour parler ensemble des problèmes et prendre des décisions opportunes pour le bien des âmes, pour devenir fort contre l’ennemi du genre humain.
Avant de reprendre l’histoire du Cœur Immaculé de Marie, essayons de voir clair sur la situation de l’Église et de discerner les moyens pour sortir de la crise. La question théologique qui se pose actuellement est l’origine du pouvoir de juridiction chez les Évêques, et la vacance du Saint Siège. Donnons quelques éléments pour essayer de comprendre.
Ce que je vais dire, je le soumets à la Sainte Église. Ce ne sont que des idées que je lance, une thèse en quelque sorte, pour faire avancer le débat en vue d’une résolution d’un problème que l’Église appelle de ses vœux, problème qu’elle n’a jamais encore eu jusqu'à présent: l'absence d'un pape depuis 60 ans.
Le constat de la vacance du siège apostolique oblige à étudier cette question de juridiction. L’origine de
la juridiction des évêques fait débat parmi les théologiens surtout depuis deux cents ans bien avant le concile Vatican I. Depuis ce concile qui a défini le dogme de l’infaillibilité du Pape : Un Pape ne peut pas tomber dans l’hérésie donc un hérétique ne peut pas être Pape, or les papes issus de Vatican II ont prêché des hérésies (liberté religieuse etc.) donc ils n’ont jamais été Pape. L’actuel occupant du siège enseigne les mêmes hérésies et donc il n’est pas Pape non plus. Cependant un Pape est nécessaire à l’Église, c’est dans sa constitution, l’Église appelle un Pape. L’Église comme société divine a évidemment en elle-même les moyens de se donner un Pape. L’Église triomphante pourrait très bien intervenir dans l’Église militante pour lui donner un Pape. Il n’y aurait aucune contradiction à ce que saint Pierre descende du ciel pour se choisir un successeur. Mais, normalement l’Église militante peut et doit se débrouiller elle-même, peut et doit se choisir un Pape sans attendre une intervention divine. Le problème est de savoir qui a autorité pour réunir les évêques afin qu’ils se choisissent un Pape. Ces évêques ont-ils juridiction pour faire un acte éminent de gouvernance sachant que le pouvoir de gouverner vient directement du Pape ?
Pour éclaircir ce point il faut partir du haut et par raisonnement théologique arriver à une conclusion théologique et ainsi résoudre ce problème. Partir du haut, c’est partir de Dieu. Dieu est trinité. Un seul Dieu en trois Personnes. Une seule Substance divine en trois personnes : Père, Fils et Saint Esprit. Bien que les trois personnes agissent ensemble dans une union mystérieuse, les théologiens, cependant, attribuent à chaque Personne une fonction spécifique. Au Père la fonction de gouverner ; au Fils celle d’enseigner ; au Saint Esprit celle de sanctifier. Ces trois fonctions ont été données par Dieu à son Église. Quand ces fonctions ont-elles été données et à qui ont-elles été données ? C’est la Sainte-Écriture et la Tradition qui vont nous donner la réponse à ces deux questions. La plus grande de ces fonctions est celle de gouverner. De même que le Père est plus grand que le Fils et que le Saint Esprit, de même la fonction de gouverner est plus grande que celle d’enseigner et de sanctifier. Quand je dis que le Père est plus grand que le Fils ou le Saint-Esprit je le dis en tant que Principe sans principe, pas selon la substance. Le Père, le Fils et le Saint Esprit sont égaux en substance ayant la même substance divine en commun. Ils ne le sont cependant pas en tant que principe agissant. Le Père engendre le Fils, le Fils est engendré par le Père. Celui qui engendre est plus grand que Celui qui est engendré. Le Père et le Fils spirent le Saint Esprit, le Saint Esprit est spiré par le Père et le Fils. Le Père et le Fils sont plus grands que le Saint Esprit.
Commençons donc par cette fonction de gouverner. Elle a été donnée à saint Pierre seul, après la résurrection de Notre Seigneur quand Celui-ci le prit à part, lui fit faire un acte de contrition pour son triple reniement et lui donna alors de gouverner les brebis et les agneaux de son troupeau. Les deux autres fonctions, celle d’enseigner et celle de sanctifier ont été données par Notre Seigneur à l’ensemble du Collège apostolique (saint Pierre et les autres saints Apôtres) juste avant de monter au Ciel quand il leur dit d’aller dans le monde entier, d’enseigner toutes les nations et de les baptiser Au nom du Père et du Fils et du Saint Esprit. La fonction de sanctifier a été redonnée à ce moment ultime d’une manière plus générale. En effet elle avait été, déjà auparavant, donnée d’une manière plus spécifique toujours au Collège Apostolique (Saint-Pierre et les autres Saints Apôtres) lors de la Sainte Cène sur le Corps et le Sang du Christ et lors de l’apparition de Notre-Seigneur, au cénacle, une semaine après la Résurrection, sur son Corps mystique (le peuple de Dieu) quand Celui-ci donna à tous ses Apôtres le pouvoir de remettre les péchés des hommes, ou de les retenir, en soufflant sur eux, c’est-à-dire en leur communiquant la puissance du Saint Esprit pour sanctifier ce même peuple.
Il s’ensuit de là que le pouvoir de juridiction, c’est-à-dire le pouvoir de dire ce qui est droit et juste, en d’autres termes, le pouvoir de gouverner, divisé lui- même en pouvoirs législatif, judiciaire et coactif, a été donné à saint Pierre seul qui le délègue à sa guise aux apôtres. Ainsi le Pape donne aux évêques une juridiction restreinte ou élargie selon son bon vouloir. Les évêques tiennent leur pouvoir de juridiction directement du Pape et non de Dieu. Par contre les évêques successeurs des Apôtres reçoivent-t-ils directement de Dieu les pouvoirs d’enseigner et de sanctifier ou les reçoivent-il du Pape ? Ou en d’autres termes le pouvoir d’enseigner et de sanctifier que les Apôtres ont reçu du Christ s’est-il arrêté à la mort des Apôtres pour passer au Pape ou s’est-il transmis aux évêques au moment de leur sacre sans passer par le Pape ? La question est posée et me semble-t-il ouverte. Pour moi j’inclinerais plutôt pour la deuxième solution. Le pouvoir de sanctifier est le pouvoir d’Ordre. Dans le cas où les évêques reçoivent ces deux pouvoirs d’enseigner et de sanctifier directement de Dieu lors de leur sacre sans passer par le Pape on pourrait dire que ces pouvoirs, ces fonctions, étant moindres que celle de gouverner sont elles-mêmes soumises à la juridiction papale mais qu’ en cas de vacance du Saint-Siège ces pouvoirs subsistent chez les évêques contrairement au pouvoir de juridiction. C’est la primauté de juridiction du Pape. Quand un nouveau Pape est élu, chaque évêque, peu de temps après, s’agenouille devant lui. Que fait-il à ce moment-là ? Il reçoit du Pape une nouvelle juridiction pour gouverner une partie de l’Église ou la confirmation d’une, déjà reçue d’un Pape précédent, mais aussi il soumet au nouveau Pape ses pouvoirs d’enseigner et de sanctifier reçus directement de Dieu afin que le nouveau Pape les lui redonne restreint ou élargie à sa guise.
C’est en vertu de ces deux pouvoirs d’enseigner et de sanctifier, reçu directement de Dieu, que Mgr Thuc, Mgr Lefèbvre et Mgr de Castro-Mayer ont sacré des évêques sans mandat apostolique, ne pouvant en avoir, puisque le Saint-Siège était vacant. Ils l’ont fait pour le bien des âmes et ils ont bien fait. Les différences entre ces évêques sont cependant notables. L’un, Mgr Thuc a été clair sur le sujet en faisant une déclaration sur la vacance du Saint-Siège avant de faire ses sacres, tandis que les deux autres ont été moins clair sur cette vacance.
Mgr Lefèbvre eut plusieurs incohérences sur
le sujet, dans ses dires et dans ses actes, avant, pendant et après les sacres de 1988. Cependant, selon certains, à la fin de sa vie, il aurait tenu pour une vacance du Saint-Siège pure et simple. Une déclaration de la vacance du Saint-Siège aurait été nécessaire au préalable pour procéder à des sacres sans mandat apostolique. Ces trois évêques n’ont donc transmis que ces deux pouvoirs, celui d’enseigner et celui de sanctifier mais pas celui de gouverner. Personne ne peut donner ce qu’il n’a pas.
La deuxième différence entre ces trois évêques c’est que l’un a respecté le pouvoir juridictionnel papal et ce, en se cantonnant uniquement de prêcher et de sanctifier les âmes par la distribution des sacrements, voire par des ordinations de prêtres et des sacres d’évêques c’est Mgr Thuc. Les deux autres n’ont pas respecté ce pouvoir du moins dans les faits. Mais dans le concret, Mgr Lefèbvre a constamment gouverné sa Fraternité avec autorité donnant à celle-ci un aspect extérieur de force, d’ordre et de prospérité mais à quel prix : celui de souiller la Sainte Messe avec le nom d’un hérétique au Canon de la Messe et cela officiellement dans toute la Fraternité, pendant des années. La FSSPX reconnait François comme Pape mais ne lui obéit pas !
Il est sûr que pour pouvoir vivre en communauté il faut un minimum vital d’autorité. Mais la différence qu’il y eu entre les deux lignées épiscopales est que dans l’une, la thuciste, les évêques ont usé, la plupart du temps, de leur autorité par mode de conseil, avec douceur et affection, s’interdisant toutes injonctions au nom de l’obéissance et n’excommuniant pas les uns et les autres au nom de la Vérité, du Bien Commun etc. Dans la lignée lefèbvriste les choses furent quand même différentes, en ce sens que l’ambiguïté originelle de la Fraternité Saint Pie X sur l’origine du pouvoir de gouverner et l’absence objective du manque de juridiction ont été bien atténuées par la bonté, la bienveillance et le bon sens de Mgr Lefèbvre. Malheureusement à sa mort les choses ne furent pas pareilles. D’abord le gouvernement de la Fraternité a été dévolu à un évêque contrairement à la volonté de Mgr Lefèbvre. Ensuite pour récupérer les legs faits à cette Fraternité qui étaient bloqués par le gouvernement non-catholique, les autorités de la FSSPX ont dû faire, probablement, des accords officieux avec le gouvernement et les autorités religieuses modernistes. Officiellement ces accords n’auraient pu avoir lieu à cause des troupes qui n’auraient certainement pas suivi.
Le résultat a été ce qu’il est actuellement. Du moins en France, une tradition forte, dominée par la FSSPX engendrant malheureusement de nombreux drames humains dus aux contradictions internes à la Fraternité.
Le pouvoir de juridiction existe ou n’existe pas, on l’a ou on ne l’a pas et il nous vient de toute manière du Pape. Donc actuellement n’ayant plus de Pape, personne ne possède ce pouvoir. Malheureusement. La conséquence en est que les non-unacum Bergoglio-François qui ne reconnaissent de juridiction à personne, n’ayant pas avec eux cette force de la juridiction et la puissance que donne une autorité légitime sont sujets à se disputer entre eux, à s’ignorer, et le démon a beau jeu pour souffler sur les braises de leur hostilités mutuelles, voire humaines, et de souffler aussi sur ceux qui les regardent "voyez comme ils se disputent, cela ne peut venir de Dieu." La vérité c’est qu’ils professent une même Foi raisonnée et logique mais en conséquence ils sont ostracisés, méprisés, jugés incompétents parce qu’invisibles. Leur apostolat est très difficile. Ils ne se permettent pas de juger quiconque mais sont jugés par la plupart. Ils prêchent la vérité, sanctifient les âmes mais le plus souvent d’une manière cachée mais cependant très réelle.
La difficulté pour tous est de savoir ce qui relève du pouvoir de gouverner, ce qui relève de celui d’enseigner et ce qui relève de celui de sanctifier. Le pouvoir judiciaire, c’est-à-dire le pouvoir de porter des jugements sur les actions des membres de l’Église et de prononcer des sentences qui obligent les sujets même contre leur gré, fait bien partie du pouvoir de gouverner, du pouvoir de juridiction. Ce pouvoir étant suspendu par la vacance du Siège Apostolique, des implications nombreuses et d’importances s’imposent à tous dans la vie quotidienne de l’Église catholique restée fidèle…
Est-ce que l’ensemble des évêques qui refusent les hérésies modernistes ont le pouvoir d’élire un Pape ? À la mort d’un Pape le pouvoir d’élire un Pape passe nécessairement au collège des cardinaux.
Voici ce que dit le cardinal Billot (1846-1931) sur le sujet aux numéros 933, 934, 935, 936 de la question 14 l’évêque de Rome de son traité sur l’Église. Je synthétise : "Il est facile de démontrer que, de fait aujourd’hui, l’élection d’un Pape relève du droit ecclésiastique puisque la loi qui règle l’élection a été établie par les Souverains Pontifes. Dans les cas normaux, le pouvoir d’élire le Pape revient aux cardinaux.
Mais qu’en est-il du droit dans un cas extraordinaire, où on devrait procéder à l’élection du Pape sans
qu’il fût possible d’observer les conditions déjà établies par la loi pontificale ? Plusieurs théologiens pensent que ce fut d’ailleurs ce qui s’est passé au moment du Grand Schisme, lors de l’élection de Martin V.
Si on admet un tel concours de circonstances, on doit reconnaître sans difficulté que le pouvoir d’élire
un Pape reviendrait à un concile général. En effet le droit naturel exige, qu’en pareil cas, les attributions du pouvoir supérieur soient dévolues au pouvoir immédiatement inférieur, dans la mesure où cela est précisément requis pour conserver la société et remédier à une extrême nécessité." Comme il n’y a plus de cardinaux valides, ce pouvoir passe encore nécessairement aux évêques restés fidèles.
J’en conclus qu’il nous faut beaucoup prier le Bon Dieu afin qu’Il intervienne pour unifier son troupeau
dévasté. À vue humaine, on en est encore loin…
Beaucoup d’âmes se perdent, un petit nombre se sauvent, le purgatoire probablement bondé de monde. C’est le secret de Dieu. Il nous faut absolument recourir à la prière, à une prière plus fervente, à une prière si intense qu’elle vienne frapper si fort au Coeur de Marie que ce Coeur maternel, navré de tant de maux qui rongent cette vallée de larmes, se souvienne que depuis des temps immémoriaux le peuple chrétien l’invoquait sous le vocable de Notre-Dame du Perpétuel Secours et que plus récemment elle se faisait un plaisir de se faire appeler sous celui de Notre-Dame qui défait les noeuds.
Donc ne perdons pas espoir et continuons notre petite histoire du Coeur Immaculé de Marie pour mieux le connaître, mieux l’aimer, mieux l’invoquer.
Nous en étions au moment où il était formé en Marie dans le sein de sainte Anne.
Le 8 septembre, une quinzaine d’années environ avant l’an zéro de notre ère, naissait dans le foyer de sainte Anne et saint Joachim une jolie petite fille que les parents appelèrent Marie. Le coeur de sainte Anne était dans la jubilation, ayant attendu pendant tant d’années cet heureux avènement. Le coeur de saint Joachim était dans la joie et l’admiration. Il paraît que sa fille lui ressemblait ! plus tard on dira que Jésus, l’Enfant de Marie, ressemblait à sa grand-mère sainte Anne. Quant au Coeur de Marie il découvrait l’amour que lui portait ses parents mais aussi la pénibilité de la vie d’ici-bas propre à toutes les petites filles. Trois ans se passèrent ainsi jusqu’au jour où Marie fut conduite au Temple.
Suite au prochain numéro.
Je vous souhaite une bonne et heureuse poursuite de cette année 2023 à partir du moment où vous recevrez
ces quelques feuilles du Sacré-Coeur.
Père Guillaume-Marie Hecquard
Quelques nouvelles de la Chapelle du Sacré-Coeur :
Récemment un baptême d’adulte lors de la veillée pascale le 8 avril 2023. M. José Bretes est maintenant membre de l’Église.
Moins récemment le baptême de Joséphine chez Maxence et Marie Hecquard le 5 novembre 2022.
Trois décès :
M. l’Abbé Philippe Guépin, le 7 février
2023 ; Madame Monique Blandin
Hecquard, le 17 février 2023 ; M.
Louis-Hubert Rémi, le 8 mars 2023.
Le projet de N. D. de Vignemont se poursuit lentement.
Toutes les informations sur l’activité de la chapelle se trouvent sur le site www.missionsaintbenoit.fr. Et si vous n’avez pas accès à internet, appelez le 06 26 54 19 78.
L’Abbé Lustosa, séminariste en philosophie poursuit ses études à La Houssière sous la vigilance et les conseils du Père Guillaume Hecquard.
Mgr Mc Guire le suit de loin et le rencontrera probablement pendant les mois d’été. Mgr Mc Guire est
venu faire des confirmations à Rennes et à Chambéry au mois de février et a dit que la prochaine fois qu’il viendrait en France il s’arrêtera à la chapelle du Sacré-Coeur.